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Appropriation des connaissances sur l’eau souterraine vers une intégration dans le schéma d’aménagement et de développement

Juillet 2022

Par Jimmy Mayrand, étudiant à la maîtrise en aménagement du territoire et développement régional, Université Laval

Contexte de la recherche

La gestion durable de l’eau souterraine à l’échelle régionale requiert plusieurs étapes : l’acquisition des connaissances, le transfert des connaissances aux acteurs régionaux, l’appropriation des connaissances par ces acteurs et la définition des actions et des orientations sur l’eau souterraine (RQES, 2021). Au Québec, le Programme d’acquisition des connaissances sur les eaux souterraines (PACES) a couvert pratiquement tout le Québec municipalisé entre 2009 et 2022 (MELCC, 2022). En ce qui concerne le transfert des connaissances, le Réseau québécois sur les eaux souterraines (RQES) a conçu une série d’ateliers qui ont été offerts aux acteurs régionaux après ou pendant la réalisation des projets du PACES. Ces activités de transfert ne visaient toutefois pas à répertorier les contraintes à l’aménagement du territoire posées par l’eau souterraine (Lavoie et al., 2013).

Face à ce constat, des travaux ont été réalisés dans le cadre du PACES Estrie afin d’entreprendre des actions pour une meilleure gestion durable reliées à l’eau souterraine dans les Plans directeurs de l’eau (PDE) des Organismes de bassin versant (OBV) régionaux (COGESAF et COBARIC) (section 6.5; Delisle, 2022). La présente rubrique résume les travaux qui ont été réalisés par la suite avec pour objectif général d’assurer l’appropriation des connaissances sur les eaux souterraines par les aménagistes des MRC afin d’en faire l’intégration dans les schémas d’aménagement et de développement. Ces travaux sont documentés plus en détail dans le rapport de l’essai-projet de Jimmy Mayrand (2021) réalisé dans le cadre de sa maîtrise en aménagement du territoire à l’Université Laval. Ces travaux avaient aussi quatre objectifs spécifiques :

  1. Identifier les besoins et les contraintes des acteurs clés relativement à l’eau souterraine;
  2. Identifier les connaissances sur les eaux souterraines qu’il est essentiel d’intégrer dans un SAD ainsi que les mesures et les outils disponibles à cette fin;
  3. Proposer des éléments à intégrer dans le SAD pour contribuer à l’exploitation durable de l’eau souterraine;
  4. Développer un protocole supportant l’intégration des eaux souterraines dans la planification territoriale.

Méthodologie

Pour répondre à ces objectifs, des entrevues semi-dirigées auprès d’acteurs clés, à savoir des aménagistes ayant déjà intégré l’eau souterraine à leur SAD, ont permis de mieux comprendre les expériences et perceptions des répondants et répondantes. Ces entrevues ont mené à l’identification des obstacles et des opportunités pour la protection de l’eau souterraine. Ensuite, le recensement des connaissances sur l’eau souterraine utiles à l’aménagement du territoire a été rendu possible grâce à la création d’un comité sur le territoire du PACES Estrie. Il était composé de deux aménagistes, d’une géomaticienne, d’une représentante de l’OBV COGESAF, d’un chercheur et d’une chercheuse. Le comité s’est rencontré à trois reprises, ce qui a permis d’analyser les outils d’aménagement, de valider la cartographie à l’échelle supralocale des zones à protéger ainsi que de prioriser les ordres d’interventions nécessaires à celles-ci. Enfin, nous avons pu déterminer le rôle de l’aménagement du territoire par rapport aux problématiques de qualité et de quantité de l’eau souterraine (voir figure 1 pour l’ensemble de la démarche).

Résultats

Le projet a permis de créer une méthode afin de permettre aux MRC et municipalités d’intégrer les connaissances sur l’eau souterraine dans les SAD et les plans d’urbanisme. Parmi les 26 cartes produites par le PACES, les entrevues ont montré qu’il y avait uniquement neuf indicateurs et paramètres utiles à l’aménagement, comme la condition de confinement de l’aquifère rocheux et la piézométrie (le niveau que l’eau souterraine atteint dans un puits). Un guide à l’attention des aménagistes a été produit, où chacun des indicateurs est expliqué en quatre questions sous forme de carte : ce que la carte représente, comment la carte a été produite, comment se servir de la carte et comment l’interpréter. Cette approche a pour objectif d’inspirer et de former les spécialistes dans le domaine.

De plus, un grand apport de ce projet au domaine de l’aménagement du territoire a été de définir un processus de priorisation des zones de recharge à protéger. Il constitue la deuxième partie du guide et consiste à prioriser les interventions à l’aide d’une grille. Le principe général de la priorisation des zones de recharge est que la protection d’une zone est prioritaire (1) s’il y a un usage important d’eau souterraine en aval de la zone de recharge et (2) s’il y a des évidences de dégradation de la qualité de l’eau souterraine dans la zone de recharge (voir tableau 1). Ensuite, les travaux ont permis d’explorer les rôles et les outils de l’aménagement par rapport à l’eau souterraine. Cette réflexion est présentée dans la troisième section du guide. Quoique les outils actuels de l’aménagement du territoire ne soient pas conçus pour les enjeux de protection de qualité et de quantité de l’aquifère, l’aménagiste peut néanmoins en utiliser certains pour amorcer la protection des zones de recharge. Enfin, le guide présente les conditions de l’eau souterraine sur le territoire des deux MRC participantes à titre d’exemple.

Le sujet vous intéresse? Le rapport détaillé, le guide et des travaux de recherche connexes sont présentés en référence.

A) Évidences de dégradation de la qualité de l’eau souterraine : 1) Aucune évidence, 2) Modérée, 3) Élevée.

B) Importance de l’usage de l’eau souterraine par des puits résidentiels ou des puits municipaux en aval de la zone de recharge : A) Faible densité de puits résidentiels et absence de puits municipaux, 2) Densité modérée de puits résidentiels et présence possible de puits municipaux, 3) Forte densité de puits résidentiels et présence de puits municipaux.

 

Cette recherche a été effectuée à l’Université Laval, sous la direction de Roxane Lavoie et de René Lefebvre